Au boulot !
"Il a travaillé avec des mains d’homme." De qui s’agit-il ? De Jésus. Qui a dit cela ? Le concile Vatican II (1962-1965) dans un document intitulé : L’Église dans le monde de ce temps. Le Fils de Dieu a travaillé. Pas de plus belle preuve de la dignité du travail aux yeux de Dieu !
Pas d’autre justification à fournir pour parler du travail professionnel dans un bulletin paroissial. C’est pourquoi nous avons donné la parole à plusieurs de nos paroissiens sur leur métier, sur les choix qu’ils ont eu à faire (ou qu’ils n’avaient pas) dans leur parcours professionnel, ce qu’ils trouvent comme satisfaction dans l’exercice de leur métier, les défis qu’il leur faut relever, les échecs qu’ils ont vécus, les implications dans leur vie de famille ou d’Église… etc.
Le travail peut être une source d’épanouissement mais aussi vécu comme une contrainte. On parle parfois de métier "alimentaire" quand la seule motivation est qu’il faut bien travailler pour vivre. La vie professionnelle peut être aussi un lieu de grandes souffrances : travail pénible, non reconnu, relations professionnelles tendues d’où des maladies professionnelles, des burn-out, des dépressions, des démissions sans perspectives pour le lendemain, des difficultés financières angoissantes, des vies conjugales brisées… et autres.
Et il y aussi celles et ceux qui sont sans travail et que parfois on traite de "feignasses !" Sur ce point et pour contrer bien des préjugés, le film "Au boulot" est à conseiller vivement.
Le travail doit aussi occuper sa juste place dans la société et dans nos vies, ne pas tout envahir, ne pas être un critère de jugement des personnes, notamment de celles qui exercent un métier peu rémunéré ou qui – comme on dit bien maladroitement – "ne travaillent pas" alors que ces personnes triment sans compter pour élever leurs enfants et offrir leurs services bénévolement. Parfois, on semble ne prendre au sérieux que les personnes qui ont une vie professionnelle. Les retraités sont alors regardés comme inutiles ou coûteux et les enfants doivent s’adapter aux journées trop remplies de leurs parents (qui ont plus ou moins le choix) ou au rythme de la vie scolaire trop peu pensé à partir des enfants eux-mêmes.
Il y a donc du pain sur la planche, il reste beaucoup de "travail" à faire pour que celui-ci retrouve toute sa noblesse et pour que tous, hommes, femmes et enfants, y trouvent leur compte. Et Dieu aussi, lui qui nous donne à chaque messe, dans le pain et le vin, les fruits de la terre et du travail des humains.Faire des choix pour la vie de famille
À la recherche d’une exploitation agricole, nous sommes arrivés en Vendée il y a presque vingt ans avec nos deux enfants, Alexandre et Simon. Nous étions issus du Maine-et-Loire ; Barbara était assistante vétérinaire et Jérôme, salarié agricole. Nous avons fait le choix professionnel de quitter notre département natal pour la Vendée afin de trouver un équilibre dans notre foyer. Nos emplois, plutôt confortables, ne nous laissaient que peu de temps à consacrer à notre vie de famille et nos enfants. Ce n’était pas le projet de vie que nous avions décidé. Nous sommes donc venus nous installer avec un atelier de chèvres laitières et de cultures céréalières en 2006 sous le nom “EARL les Inséparables”. Après des travaux d’amélioration de l’élevage, sont nées nos filles Marie, puis Jeanne. Gérer une exploitation agricole s'avère difficile. Les contraintes horaires, la météo, la gestion administrative et la surveillance d’un troupeau sont un défi quotidien. Ce n’est certes pas de tout repos chaque jour mais cela nous offre le bonheur de profiter de moments privilégiés avec nos enfants. Nous leurs transmettons la passion de notre métier, la beauté et la préservation de la nature, le goût de l’effort, l’approche du monde animal, ainsi que la solidarité.
Notre métier nous demande un temps de travail et d’efforts soutenus, mais nous avons l’avantage d’avoir un agenda flexible en dehors des heures de traite. Flexible pour les enfants (rendez-vous, activités extrascolaires) mais aussi pour l’Église. Barbara donne de son temps en tant que catéchiste en école primaire et au collège. Elle participe à la préparation de la profession de foi et fait partie d’une équipe liturgique. Jérôme est sacristain à l’église de Chantonnay.
Ces temps partagés en paroisse nous permettent de sortir de notre quotidien et de nous ouvrir aux autres. Nous essayons d’inculquer ces valeurs de partage, de solidarité et d’écoute à nos enfants.
JÉRÔME et BARBARA - Chantonnay
Ma source de bonheur : rendre mes clients heureux !
Je suis venu de Saint Malo afin de m’installer en 2006 pour intégrer un poste de conseiller au sein d’une banque. Cela m’a permis de faire de très belles rencontres amicales mais aussi d’avoir croisé certains managers obnubilés par les résultats, le profit et souvent à l’encontre de la bienveillance humaine. Cette pression permanente était semblable à du harcèlement au travail, et je ne voulais pas devoir vendre des produits inadaptés aux clients et à l’encontre de mes valeurs. Le corps et le mental se sont mis à l’arrêt et il a fallu s’arrêter, un burn-out, la maladie du siècle dans nos sociétés occidentales. Cet arrêt fut une bénédiction, en tombant au plus bas, on ne peut que se relever et ce fut le cas. J’ai donc décidé de me lancer à mon propre compte dans le domaine du courtage en prêt immobilier. Quelle satisfaction de pourvoir accompagner ses clients dans leurs projets de vie et quelle joie de pouvoir leur faire gagner de l’argent en négociant auprès des banques. Ma relation en tant qu’entrepreneur n’est pas basée sur le profit ; cela ne m’intéresse pas mais ma source de bonheur est de pouvoir rendre mes clients heureux et j’ai appris à connaître de magnifiques personnes qui sont devenues pour certains amis. La vie d’entrepreneur est faite de hauts et de bas. Chaque année l’activité peut être remise en cause par des choix politiques qui impactent l’économie ou des événements exceptionnels comme le COVID, mais il ne faut jamais baisser les bras et toujours se souvenir d’où l’on vient.La foi a toujours été présente en moi depuis mon tout jeune âge, guidé par des grands-parents très pieux. La religion est semblable à un berger ; elle donne une direction : dissocier le bien du mal, garder de l’espoir quand le fond du tunnel est sans fin.
Elle permet de se rendre compte du bonheur qu’on a dans nos vies personnelles comme professionnelles ; elle permet de pouvoir se remettre en question sur les mauvaises paroles ou pensées durant la semaine écoulée afin de devenir meilleur, car au fond, nous ne sommes que des humains.
La foi me permet d’être en communion avec mon Seigneur et en constante relation avec nos proches défunts pour un rassemblement à venir tous ensemble.
Être bien dans son travail, ce n’est pas gagné
Je m’appelle Nicolas, paroissien de Saint-Vincent-de-Chantonnay, engagé dans la paroisse, marié depuis vingt-six ans, papa de deux enfants. J’ai été recruté comme conducteur de ligne de production dans une grande entreprise locale d’agro-alimentaire. Par un drôle de concours de circonstance, car je ne sais pas par quel biais mon curriculum-vitae que tenait la RH (responsable des ressources humaines) lui était parvenu… Ce poste correspondait bien avec mes dernières études, un DUT (diplôme universitaire technologique) en Industrie Ag. Je n’avais pas de ‘’plan’’ de carrière. En revanche, j’ai su, à certains moments, dire à mon responsable qu’au fil du temps je m’ennuyais à mon poste. La force d’une grande entreprise, c’est de proposer divers postes qui m’ont permis d’évoluer. Jusqu’au poste que je tiens actuellement. C’est un vrai challenge, chaque jour, pour lequel je m’appuie sur mon expérience et ma bonne connaissance de l’usine. C’est parfois le grand écart dans les tâches : du chiffrage, de l’analyse de chiffres, de postes, des observations de postes, de process, des réunions de présentation, de la programmation, de devis de projets. C’est cette diversité de sujets qui me permet de ne pas m’endormir sur mes lauriers, et aussi de garder ma motivation. Le grand défi du moment, c’est de rénover le système nerveux central informatique de l’entreprise, de s’appuyer sur la connaissance profonde de l’usine pour modéliser et démarrer un nouveau schéma de production. Pour moi, le travail en équipe est important, même si dans mes tâches, je travaille plutôt seul. Cela me permet de m’appuyer sur mes collègues, mais aussi de leur venir en aide.
Dans les différentes tâches du quotidien, la foi est peu présente, si ce n’est une anodine fève à l’effigie de Marie qui trône sous mon écran d’ordinateur. Je ne prends pas le temps de prier au travail (pour autant, personne ne m’en empêche), mais elle est là, présente. La foi, elle, s’exprime dans le contact avec les collègues, dans le soutien qu’on peut leur donner, comme dans celui reçu de leur part.
Je m’appelle Emmanuelle, j’ai 52 ans, je suis maman de deux enfants et mariée à Nicolas depuis vingt-six ans. Aujourd’hui, je suis responsable Qualité Sécurité Environnement dans une entreprise de quatre-vingts salariés dans le domaine de la Métallurgie. J’apprécie la diversité des missions de mon poste et notamment la partie Environnement qui répond à une valeur qui m’est chère. Après quelques années d’expérience (première expérience) dans le domaine de la Plasturgie et un bilan de compétences, j’ai pu mettre des mots sur ce que je recherchais dans mon travail. Je sais, par exemple, que j’ai besoin du contact avec la production, le terrain, les gens. J’aime comprendre l’aspect technique du process et être à l’écoute de mes collègues, des problèmes qu’ils rencontrent à leur poste de travail et pouvoir réfléchir avec eux aux solutions possibles. Ces échanges sont très enrichissants pour moi. Ma difficulté est de vouloir résoudre tous les problèmes et dépasser alors mes fonctions et empiéter sur le rôle d’autres collègues. Un autre point que j’ai su identifier également comme primordial dans un choix professionnel, c’est l’engagement de ma hiérarchie et son exemplarité. Par exemple, en termes de sécurité au travail, qui est un de mes champs d’action, c’est important pour moi de savoir que ma Direction se soucie de la santé et de la sécurité de son personnel et est prête à mettre en place des actions pour améliorer les conditions de travail. Et surtout que je serai soutenue dans les projets mis en place. Il ne s’agit pas seulement d’un engagement financier, mais moral également. J’ai eu une expérience malheureuse où je n’étais plus en accord avec ma Direction. J’allais au travail avec la boule au ventre et plus aucune motivation. C’est difficile de quitter un travail quand on sait que ça remet en cause la stabilité financière de la famille. J’ai eu la chance d’être soutenue et encouragée par Nicolas qui voyait mon mal-être au jour le jour.
Je rends grâce pour la protection qu’il m’a apportée à cette période de ma vie professionnelle et de m’avoir permis de quitter cette entreprise librement.