Professeur, responsable pédagogique, directeur de lycée :

retour sur une longue expérience.


Nous avons saisi l’occasion du départ à la retraite de Jean Michon, directeur du lycée Sainte-Marie à Chantonnay, pour lui demander de revenir sur son expérience au sein d’établissements catholiques. Merci à Jean qui a répondu spontanément à notre demande. Nous lui souhaitons également une heureuse retraite où il ne manquera pas de continuer de donner de sa personne avec son optimisme, son enthousiasme et son énergie pour se lancer dans de nouveaux projets. ?  

                                          Patrice BOURSIER, curé



Après 11 années passées à Chantonnay, je vais quitter ma fonction de chef d’établissement du lycée Sainte-Marie le 13 juillet pour, « faire valoir mes droits à la retraite » et passer le relai à mon successeur, M. Anthony Bailly, directeur actuellement en poste dans le Choletais. C’est avec joie que je réponds par ce texte à la demande de l’abbé Patrice Boursier.
1980-2021 :0Quatre décennies dans l’Enseignement Catholique ouvert à tous et associé au service public d’éducation… 


En regardant dans le rétroviseur, ces 41 années de vie professionnelle au service de l’éducation des jeunes ont connu des évolutions sensibles de la société, des contextes et des réalités du monde de l’éducation en général, de l’enseignement, de l’autorité, de la façon de transmettre, des familles et de la jeunesse…

Les jeunes de 2021 ne sont pas ceux de 1980 et il a été nécessaire de s’adapter régulièrement aux élèves qui eux ont toujours eu 18 ans en Terminale, alors que les enseignants vieillissaient d’une année supplémentaire tous les ans, creusant ainsi l’écart entre jeunes et adultes. Cette volonté de prendre en compte l’évolution des jeunes, ce souci de les comprendre, de s’intéresser à leurs préoccupations et leurs centres d’intérêts m’ont toujours paru essentiels pour ne pas être décalé des réalités qu’ils vivent dans une société en mouvement permanent et qui se complexifie.


J’ai cependant pu noter quelques constantes valables en 2021 comme en 1980…


  • ( Nous travaillons toujours à la transmission de connaissances et de compétences en cherchant à assurer un socle de culture générale… sous la forme de pratiques pédagogiques qui évoluent en fonction des techniques (cf. la place du numérique) et des modes sociétales.
  • ( Nous éduquons toujours à des valeurs essentielles afin de promouvoir la réalisation de soi et la croissance de chacun pour un mieux « être ».
  • ( Nous sommes amenés à devoir adapter en permanence le curseur entre exigence et bienveillance.
  • ( Nous travaillons avec des élèves du bocage vendéen qui sont pour l’immense majorité, toujours aussi sympathiques, souriants, suivis par des parents soucieux de leur éducation, des jeunes prêts à s’engager pour des causes (de façon plus ponctuelle et moins sur la durée actuellement).


Je me suis toujours senti très à l’aise dans l’Enseignement Catholique qui scolarise 52% des jeunes vendéens. Nous y proposons une éducation à la fois intellectuelle, physique, humaine et spirituelle mais dans le respect des valeurs de chacun. Avec une référence claire mais sans prosélytisme. Dans une réelle liberté de conscience. Avec un projet d’établissement élaboré collectivement impliquant la communauté éducative et qui sert de repère à chacun des acteurs du lycée. Ainsi nous travaillons à offrir au jeune un cadre à la fois souple et sécurisant, bienveillant et exigeant, qui permette aussi de transformer les erreurs et les échecs en source de progrès… J’ai toujours essayé de travailler dans un climat de confiance et d’exercer une autorité qui n’humilie pas mais qui cherche à faire grandir. Parfois avec fermeté ; en utilisant la sanction comme moyen éducatif (qui dit que la limite a été franchie, qui répare et qui permet de tourner la page).


Les parents attendent de notre lycée qu’il ne soit pas seulement un lieu d’enseignement de qualité ; ils attendent aussi que leur enfant puisse y trouver des repères (ce qu’ils nomment souvent des « valeurs ») qui leur paraissent nécessaires pour apprendre à vivre en société, qui donnent des raisons de vivre et d’espérer. Les parents recherchent aussi un accueil de chacun, un cadre, de la proximité, de la disponibilité, du suivi, un accompagnement personnalisé, des exigences éducatives et des projets. Tout cela au service de l’épanouissement de leur jeune. C’est un beau métier que de travailler à promouvoir la personne humaine. À travailler à l’humanisation des jeunes. À développer l’apprentissage de leur relation avec autrui. Le « nous » et le « je ». Un travail jamais fini… et à recommencer à chaque nouvelle année scolaire. Avec modestie et sans réussir à tous les coups !


Je quitte mes fonctions, heureux et avec le sentiment d’avoir donné ce que j’ai pu, ce travail m’a permis de m’épanouir, de m’accomplir. J’ai exercé des missions variées : professeur, responsable pédago-gique, directeur-adjoint puis chef d’établissement, dans trois établissements essentiellement : La Tourtelière (à Montournais), Jean XXIII (aux Herbiers), Sainte-Marie (à Chantonnay). J’ai beaucoup apprécié l’autonomie dans ma dernière fonction, un métier au cœur de la relation, un peu comme un chef d’orchestre au service    de    la    communauté   éducative, entouré par une équipe de direction, des personnels et des enseignants très investis. J’ai voulu faire ma part pour m’inscrire dans cette histoire du lycée Sainte-Marie hérité des sœurs de la Sagesse depuis 1837, en participant au dynamisme et au développement du lycée (ouverture de formations nouvelles, constructions pour améliorer le confort des adultes et des élèves, accroissement des effectifs…). L’établissement permet une belle synergie avec le CFP, l’UFA, le lycée professionnel, le lycée  technologique,   le  lycée  général  et l’internat. Et comme nos prédécesseurs dont nous sommes les héritiers,  nous avons tissé et développé des liens durables avec de multiples partenaires (la paroisse, la municipalité, les associations, les entreprises, les collectivités territoriales, les pays étrangers…).


J’ai beaucoup apprécié de travailler avec passion au service de la jeunesse de notre pays, dans des communautés éducatives pleines de vitalité, de créativité et d’audace pédagogiques. Mon métier m’a permis de rencontrer des personnes inspirantes qui m’ont marqué. Quelle chance !


Il reste encore des points de vigilance et des défis à relever, je n’en citerai que trois :

  • ( le défi de la fraternité,
  •  le défi des écrans (qui est celui de l’attention, celui de la validité et de la hiérarchisation de l’information), 
  • le défi du respect de la planète.

J’ai beaucoup de gratitude envers toutes les personnes rencontrées dans ce bocage vendéen où la qualité de vie est bien réelle et les relations humaines saines. MERCI. ?

Jean MICHON